• Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

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    Donc je racontai la grève des ouvriers des estancias au groupe de journalistes, puis l’histoire des indiens Tehuelches, et puis Magellan, enfin, tout ce que je savais. Je m’honore d’avoir trouvé des connaisseurs aux oreilles attentives, vraiment un plaisir.

    Une fois rentrés en France, je leur fis parvenir les photos des Tehuelches que j’avais (celles du chapitre 29). Je les avais dénichées chez un photographe de Río Gallegos, qui avait gardé les négatifs (des plaques de 20 cm par 10). Il en tirait encore des cartes postales dans les années 1980.

    Jacques Roure fit un article de voyages dans l’Express, et se fendit d’un entrefilet élogieux mentionnant mon nom et me qualifiant « d’encyclopédie vivante de la Patagonie ». Je n’invente rien.

    Ce furent des voisins de mes parents, au pays, qui le leur passèrent, je n’étais même pas au courant. Un peu plus et le paternel se le mettait autour du cou pour aller chercher du pain à la boulangerie !

    Du coup cet été austral là, (novembre, décembre, janvier) tous les touristes français qui débarquaient à Río Gallegos, l’Express sous le bras, demandaient au guide, si c’était une fille :

    « – C’est vous Sandra Fierro ?

    – NAN ! elles aboyaient presque, c’est elle ! » en me désignant d’un geste excédé.

    J’étais la seule à trouver ça drôle, bien sûr.

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Article de l’Express, n° 1947 du 28 octobre au 3 novembre 1988, p. 170

     

    Quelquefois les groupes faisaient un crochet par le Chili austral, par le Parc National Torres del Paine. Des centaines de kilomètres de gravier par la route 40, la mythique route 40 qui traverse l’Argentine du Nord au Sud en longeant la cordillère. On passait par Cancha Carrera.

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Aucune auberge digne de ce nom ne servait à manger, juste un café et des toilettes sur le trajet. On prenait donc des sandwichs, et nous mangions dans le car. Dehors, un vent de 50ièmes rugissants.

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Des passagères me demandèrent de sortir s’asseoir entre les touffes d’herbes jaunes de coirón pour pique-niquer.

    « Se le va a volar el yogur », me dit le chauffeur Eugenio. (Son yaourt va s’envoler !) Elles insistèrent, pour faire l’expérience. Et elles ont mangé dehors !

    La porte du car n’était pas coulissante, elle s’ouvrait comme une portière de voiture. Nous étions obligés de nous arrêter face au vent pour ne pas l’arracher de ses gonds. Pour faire monter les passagers, on la tenait ouverte à deux, lui et moi, arcboutés le dos au vent.

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    On traversait des estancias, bien sûr, et parfois on longeait les bâtiments. Avec de la chance, on voyait quelques employés à cheval, les fameux gauchos. « A partir du moment où tu manges la même chose qu’eux, me disait un propriétaire d’estancia, ton compte en banque ne les intéresse pas ».

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    Cerro Castillo

     

    On passait la frontière et on rentrait dans le Parc National, des troupeaux de guanacos à chaque virage, un enchantement. Puis on arrivait à Pehoe, à l’auberge sur le lac au pied des Cornes du Paine. Une bizarrerie géologique fait qu’elles sont bicolores comme un gâteau suisse. Le sentiment d’être au bout du monde.

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    Les Cornes du Paine - Parc National Torres del Paine, Chili

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    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Hosteria Pehoe, au pied des Cornes du Paine, Chili

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

     

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Parfois on y allait en voiture, en accompagnant des passagers individuels. Je ne sais plus pourquoi un jour, pour deux passagers, nous étions deux guides, Alex et moi. Il devait faire une reconnaissance ou quelque chose comme ça. Alex, c’était la curiosité même. Il s’intéressait aux gens, posait des questions, les faisait parler. Sa spécialité, c’était les Italiens. Je me souviens encore de son « fiume Santa Croche », un jour où c’est moi qui dormais au fond de son car de passagers sur la route de Gallegos, et c’est lui qui travaillait. Alex, c’est l’intelligence et la gentillesse ensemble, une perle de guide.

     

    En ressortant des Torres del Paine, on descendait encore plus au Sud, passant par Puerto Natales, jusqu’à Punta Arenas, la ville chilienne sur le détroit de Magellan.

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Punta Arenas, Chili, au fond le détroit de Magellan

    Chapitre 35 - Un bout de la Patagonie chilienne : Torres del Paine

    Punta Arenas,  père et fille

    Puis on longeait la rive nord du détroit, et on revenait en Argentine jusqu’à Río Gallegos.

    Comme nous avions quelques heures à longer ce détroit mythique, à tout seigneur tout honneur, je parlais de Fernand de Magellan.

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